Shoko Noda, Sous-Secrétaire générale des Nations Unies et Directrice du Bureau des crises du PNUDAvis par Shoko Noda (Les Nations Unies)Mardi 13 août 2024Inter Press Service
NATIONS UNIES, 13 août (IPS) – Treize ans après son accession à l’indépendance, le Soudan du Sud est confronté à de profonds défis humanitaires. Le premier jour de l’indépendance du Soudan du Sud a été empreint d’un grand sentiment d’espoir.
Je me souviens des foules qui acclamaient le pays dans les rues, agitant haut le nouveau drapeau. Treize ans plus tard, la plus jeune nation du monde, à peine entrée dans l’adolescence, est confrontée à de profonds défis.
Au cœur des défis auxquels le Soudan du Sud est confronté se trouve une crise humanitaire d’une ampleur vertigineuse. Sachant que sept millions des 12,4 millions d’habitants du pays devraient souffrir de la faim cette année et que neuf millions d’entre eux ont désespérément besoin d’aide humanitaire, la gravité de la situation ne peut être surestimée.
Une personne sur dix n’a pas accès à l’électricité. Soixante-dix pour cent d’entre eux n’ont pas accès aux soins de santé de base. Or, il s’agit là de droits fondamentaux dont la grande majorité des gens sont privés.
J’ai pu constater de mes propres yeux la situation humanitaire désastreuse du Soudan du Sud lors de ma visite dans le pays en mars. J’ai rencontré des femmes et des enfants déplacés par le conflit – certains pour la deuxième fois de leur vie – dans un centre de transit à Malakal, la capitale de l’État du Haut-Nil. Ils n’avaient rien et dépendaient entièrement de l’aide. Leur sort reste gravé dans mon esprit et dans mon cœur.
Alors qu’il célèbre son 13e anniversaire d’indépendance, le Soudan du Sud se trouve à un moment crucial de son parcours de construction nationale.
L’aide humanitaire ne peut à elle seule résoudre l’écheveau complexe des défis auxquels le Soudan du Sud est confronté. Une approche holistique est nécessaire, qui jette les bases de l’autosuffisance, de la paix et du développement durable.
Alors que le processus constitutionnel est en cours et que des élections se profilent à l’horizon, les efforts que nous déployons aujourd’hui façonneront la trajectoire du pays pour les générations à venir. Nous devons renforcer les institutions, favoriser la stabilité et donner les moyens d’agir à la jeunesse, force motrice des aspirations de la nation au progrès et à la prospérité.
L’aide humanitaire ne peut à elle seule résoudre l’écheveau complexe des défis auxquels le Soudan du Sud est confronté. Une approche holistique est nécessaire, qui jette les bases de l’autosuffisance, de la paix et du développement durable.
L’autonomisation des femmes et des filles, qui sont confrontées à des difficultés et à des vulnérabilités disproportionnées face aux conflits, aux déplacements et au changement climatique, est au cœur de cette démarche. Les taux de violences basées sur le genre, de mariages d’enfants et de mortalité maternelle sont alarmants, ce qui souligne le besoin urgent d’interventions ciblées qui donnent la priorité aux droits et à la dignité des femmes et des filles.
Lors de ma visite à Malakal, j’ai rencontré des jeunes femmes dont les histoires m’ont montré de manière saisissante les obstacles auxquels elles sont confrontées au quotidien : de la peur pour leur sécurité à l’incapacité de parler de leurs espoirs et de leurs aspirations, ou encore au refus d’opportunités d’emploi.
Cela ne devrait pas être ainsi.
Notre équipe sur le terrain travaille dur pour améliorer la vie des femmes et des filles au Soudan du Sud. J’ai été impressionnée par les tribunaux de Juba, mis en place avec le soutien du PNUD, qui se concentrent sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes. Nous travaillons également à assurer l’inclusion des femmes dans les processus de consolidation de la paix, à promouvoir l’égalité des sexes et à créer des opportunités pour que les femmes et les jeunes puissent s’épanouir.
Mais il reste encore beaucoup à faire.
Avec 75 % de la population composée de jeunes, ils représentent à la fois le plus grand défi du Soudan du Sud et son atout le plus prometteur. Négliger d’investir dans la jeunesse revient à négliger l’avenir du pays lui-même, un risque que nous ne pouvons pas nous permettre de prendre.
Leurs voix doivent être entendues, leurs aspirations nourries et leur potentiel libéré.
Le Soudan du Sud se trouve à la croisée des chemins.
Avec le soutien adéquat, le pays a le potentiel de créer un avenir fait d’espoir, de prospérité et de stabilité pour tous. L’alternative serait une aggravation d’une crise déjà profonde et prolongée.
Le Soudan du Sud ne peut pas s’engager seul sur cette voie. Il a besoin d’un soutien qui transcende ses frontières pour surmonter les innombrables défis auxquels il est confronté. Une coopération accrue au développement – celle qui aide les populations à rompre le cycle des crises et à construire des vies plus sûres, plus stables, plus résilientes et plus durables – est nécessaire de toute urgence.
J’espère revenir dans 10 ans et voir les familles que j’ai rencontrées au centre de transit de Malakal installées en paix, leurs enfants adultes et prospères, avec des moyens de subsistance stables et un accès à tous les services dont ils ont besoin pour subvenir à leurs besoins et nourrir leurs espoirs et leurs aspirations pour l’avenir.
Voilà à quoi ressemble le développement.
Shoko Noda est Sous-Secrétaire générale des Nations Unies et Directrice du Bureau des crises du PNUD
Source : Afrique Renouveau, un magazine numérique des Nations Unies qui couvre l’évolution économique, sociale et politique de l’Afrique, ainsi que les défis auxquels le continent est confronté et les solutions que les Africains eux-mêmes apportent à ces défis, notamment avec le soutien des Nations Unies et de la communauté internationale.
Bureau de l’IPS pour les Nations Unies
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